Les pompes à chaleur privées de garantie décennale dans l’immobilier ancien
Les pompes à chaleur ont la cote auprès de l’État qui voit dans ces équipements un dispositif écologique et économique. Le gouvernement verse des aides pour inciter les particuliers à installer une pompe à chaleur comme MaPrimeRénov’. «La France doit produire 1 million de pompes à chaleur sur son territoire d’ici 2027 », écrit même le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, sur X, ce lundi. Toutefois, depuis le 21 mars dernier, ceux qui se décident à sauter le pas et à installer une pompe à chaleur sont moins protégés par les assurances qu’avant. Une jurisprudence rendue par la Cour de cassation change effectivement la donne.
Rappelons les faits: en novembre 2012, une société installe un insert, poêle à bois encastré dans l’âtre d’une cheminée d’un couple mais un incendie détruit la maison en 2013. Le couple estime que l’incendie est imputable à l’insert de la cheminée et est indemnisé en partie, à hauteur de 142.000 euros environ par son assureur multirisque habitation mais il réclame un complément de près de 80.000 euros à l’installateur qui avait souscrit une assurance décennale auprès d’Axa. Pour rappel, la garantie décennale couvre les professionnels du bâtiment en cas de dommages survenus sur un chantier dans les 10 ans après réception des travaux.
Axa refuse de faire jouer la garantie, comme le rapporte Le Monde . Elle conteste la jurisprudence par laquelle la Cour de cassation a étendu le bénéfice de la garantie décennale aux éléments d’équipement sur l’existant le 15 juin 2017. Depuis ce jour, la garantie décennale ne concerne plus les constructions neuves uniquement mais aussi celles en rénovation. Avant cette date, seule la garantie biennale était nécessaire pour les équipements en rénovation.
Un retour en arrière
Axa perd en première instance et en appel mais coup de théâtre, devant la Cour de cassation, Axa gagne (22-18-694). Le parquet général lance une consultation sur les incidences de la jurisprudence de la Cour de 2017 auprès des professionnels et de l’Institut national de la consommation qui explique que les particuliers «n’ont pas le réflexe» de faire jouer la garantie décennale. De leur côté, les artisans répondent que depuis juin 2017, ils ne souscrivent pas plus d’assurances décennales qu’avant, car leur coût est trop élevé. Ils risquent pourtant des sanctions pénales s’ils ne recourent pas à cette garantie.
La Cour renonce ainsi à sa jurisprudence de juin 2017 après avoir constaté qu’elle «ne s’est pas traduite par une protection accrue des maîtres d’ouvrage». Elle juge que désormais les éléments d’équipement sur l’existant relèveront de la «responsabilité contractuelle de droit commun» des installateurs mais celle-ci n’est pas soumise à une obligation d’assurance. «C’est pourquoi il apparaît nécessaire de renoncer à cette jurisprudence et de juger que, si les éléments d’équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l’assurance obligatoire des constructeurs», est-il écrit. Les inserts ne sont pas les seuls concernés par ce retour en arrière. Les pompes à chaleur qui tombent en panne le sont aussi.
Le couple ne sait pas si leur installateur avait souscrit une assurance responsabilité civile. Et cette dernière couvre uniquement les dégâts comme les incendies mais pas les dysfonctionnements. En cas de rénovation d’un logement, les particuliers sont donc moins bien protégés que s’ils installent une pompe à chaleur dans un bien neuf, et ce même si le dysfonctionnement de la pompe à chaleur est le même dans les deux cas.